Contenu du La Villa Majorelle dans son quartier et histoire

Une maison à proximité des Ateliers Majorelle

La Villa Majorelle fut construite sur un terrain appartenant à la belle-famille de Louis Majorelle, à proximité de l’entreprise familiale. Quelques années auparavant, en 1897, l’ébéniste avait demandé à l’architecte Lucien Weissenburger de construire de nouveaux ateliers dans ce quartier alors en pleine urbanisation. Peu d’archives sont conservées sur l’usine d’art, permettant de connaître l’architecture et l’organisation interne de l’entreprise. Un article paru en 1906 dans la Revue Industrielle de l’Est donne quelques informations. Les illustrations publiées confirment l’existence de différents espaces, rue du Vieil Aître, abrités sous une charpente métallique et possédant de grandes baies vitrées, d’une surface totale de 3 500 mètres carrés. Ces photographies témoignent d’une claire répartition du travail, chaque atelier ayant une fonction précise : ébénisterie, marqueterie, sculpture sur bois, finition, décoration des étoffes et tentures, travail du métal (ciselure, bronze et ferronnerie d’art) dans lesquels travaillent parallèlement plusieurs ouvriers. Un espace était également dédié au modelage et un autre au dessin. Ces clichés évoquent des bâtiments modernes, éclairés par de larges fenêtres ou verrières, équipés avec des machine-outils et alimentés grâce à l’électricité, permettant de proposer aux 250 employés de la Maison Majorelle, en 1905, un cadre de travail adapté et fonctionnel pour cette époque.

La Villa Majorelle : victime de la première guerre mondiale

Pendant la première guerre mondiale, Nancy fait l’objet de nombreux bombardements allemands par voie aérienne ou par des canons à longue portée. Ces bombardements n’ont pas toujours des objectifs précis mais visent certains quartiers de la ville, le centre mais également les faubourgs. Ils semblent surtout destinés à instiller, au sein de la population, une crainte constante. Le quartier de la Villa Majorelle, excentré et résidentiel, est concerné par ces attaques en 1916, en particulier la rue des Goncourt et la rue du Vieil Aître. Dès le 1er janvier de cette année, plusieurs bombardements visent la rue du Vieil Aître, voisine de la Villa Majorelle, qui vont avoir des conséquences sur la façade sud de cet édifice, en particulier sur les vitraux. Ceux de la salle à manger sont abîmés mais surtout celui du salon, œuvre de Jacques Gruber, est détruit et sera remplacé, par la suite, par un vitrail d’inspiration marocaine. Plusieurs documents et clichés photographiques, conservés aux Archives Municipales de Nancy, témoignent des destructions dans cette rue, également mentionnées dans un courrier de Jacques Majorelle à Etienne Cournault où il relate les dommages sur la maison familiale :

« Un éclat est entré dans la salle à manger cassant tout sur son passage, et si mon père avait été assis à sa place il avait la tête tranchée. Le toit est défoncé et les carreaux que l’on voulait remettre après le deuxième bombardement ont été réduit en miette par le 3ème. La maison n’est plus qu’un lamentable squelette, éventré un peu partout, plus un vitraux [sic], plus une porte intérieure intacte ». (Lettre du 6 janvier 1916, collection particulière).

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Une villa transformée en bureaux : l'après Majorelle

En 1931, quelques années après le décès de son père, Jacques Majorelle vend la propriété familiale alors qu’il s’est déjà installé au Maroc. Le Ministère des Ponts-et-Chaussées acquiert la maison pour y installer ses bureaux. Ce choix peut apparaître surprenant pour une maison particulière assez éloignée du centre ville et des administrations locales. Peu de modifications seront effectuées au sein de la villa à l’exception de la terrasse sur la façade nord. Cet espace a été considéré comme trop exigu et un bow-window a alors été construit afin d’agrandir la pièce et de pouvoir y aménager des bureaux. Cet ajout a été détruit en août 2019 lors de la rénovation intérieure de la villa afin de revenir à l’état de la maison du vivant de son commanditaire, Louis Majorelle. Si le Ministère des Ponts-et-Chaussées a acquis la propriété, il n’avait pas l’utilité du vaste jardin de près d’un hectare. Aussi, le terrain a été loti en 25 parcelles (de 194 à 637 m²) et une nouvelle rue, qui a pris le nom de Louis Majorelle, a été créée à cette période. Plusieurs maisons de ce lotissement se révèlent caractéristiques de l’architecture des années 1930.

Une reconnaissance tardive

L’achat de la Villa Majorelle par le Ministère des Ponts-et-Chaussées a permis de conserver en l’état cette maison emblématique de l’Art nouveau nancéien. Alors que d’autres édifices issus de ce mouvement artistique étaient, jusque dans les années 1980, détruits ou largement modifiés. L’École de Nancy a connu une rapide et longue désaffection depuis la première guerre mondiale jusque dans les années 1970. Dans ces années, l’Art nouveau a été redécouvert dans divers pays et villes européennes et a commencé à être étudié et protégé. En janvier 1975, le secrétariat d’État à la Culture a inscrit, à l’Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques, plusieurs édifices École de Nancy dont des immeubles et maisons d’Émile André, la Villa Bergeret de Lucien Weissenburger ainsi que la Villa Majorelle. C’est le seul monument inscrit dans sa totalité, c’est-à-dire tant pour son architecture que pour son décor extérieur et intérieur (vitraux, boiseries, grès , …). En 1996, le Ministère de la Culture décide d’améliorer la protection de cette maison. La Villa Majorelle est alors Classée Monuments Historiques en totalité, y compris le mur de clôture et le portail, selon le motif suivant précisé dans l’arrêté : « en raison du caractère pittoresque de ses volumes et de l’exceptionnelle créativité de son décor intérieur, dû en grande partie à Louis Majorelle et Gruber pour les verrières ».

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