Contenu du Bonum vinum in corpore sano

In vino sanitas

Nos ancêtres croyaient fermement à l’oenothérapie : pendant des siècles, le vin sembla une panacée, et il le resta longtemps avant que l’on n’en pointe les dangers.

Antiquité et Moyen Âge : l'alimentation comme médecine

Médecine et alimentation ne sont pas séparées à cette époque, le vin est un aliment comme un autre, qui peut permettre de contrebalancer les déséquilibres des humeurs, dont provient toute maladie pour les médecins d'alors. C’est donc tout naturellement que Galien lui donne une place dans son arsenal thérapeutique, comme Hippocrate avant lui. Ainsi “les rouges (...)  sont les plus convenables pour générer le sang, parce qu’ils ont besoin d’une moindre transformation pour se changer en sang”. Le Moyen Âge ne rompt pas avec les traditions antiques, transmises par l’École de Salerne qui prescrit maints usages du vin, dont on peut retirer les principes suivants : tous les vins ne se valent pas et la modération est de rigueur. Les usages du vin répertoriés ailleurs sont multiples : désinfecter les plaies, vider les abcès, soulager le foie (!), aiguiser l’intelligence.

Temps modernes : le vin est toujours bon pour tout ou presque

Comment ne pas évoquer Rabelais, chantre de la dive bouteille ? Le vin est omniprésent dans son œuvre et vanté à maintes reprises. Rabelais étant également médecin, il peut se prévaloir d’une certaine connaissance en la matière : suivons donc ses recommandations et n’abusons pas de l’eau ! A la fin du XVIIe siècle, Nicolas Lémery donne dans sa Pharmacopée universelle de nombreuses recettes de remèdes à base de vin : contre la paralysie, la fièvre, le scorbut. On y trouve également la recette du baume du Samaritain. Cette recette très ancienne est encore recommandée aujourd’hui comme remède de grand-mère. Helvétius conseille le vin aux convalescents : “quant à la boisson, ils préféreront le vin de Bourgogne”.

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Époque contemporaine : des découvertes scientifiques controversées

Le vin est toujours perçu comme une bonne thérapeutique. On lui oppose les alcools de distillation, qui font des ravages, comme l’absinthe. La modération est de rigueur. Pasteur pensait que “le vin peut être, à bon droit, considéré comme la plus saine, la plus hygiénique des boissons”.
Pendant la Première Guerre mondiale, le vin était utilisé pour soutenir le moral des troupes. Apollinaire lui-même l’évoque dans ses Calligrammes : “J'ai comme toi pour me réconforter / Le quart de pinard / Qui met tant de différence entre nous et les boches".
Au milieu du XXe siècle, le vin est encore considéré comme un médicament : dans un album pour enfants, un renard se sert du vin de Champagne pour aider une vache malade à guérir !
Le docteur Maury, s’appuyant sur des études scientifiques, vante également le vin comme médication presque universelle. A la fin du XXe siècle, une étude aujourd’hui très controversée de l’Office international de la vigne et du vin met en évidence le paradoxe français : la prévalence faible de maladies cardio-vasculaires, malgré une alimentation riche en matières grasses. L’étude paraît cependant très biaisée et les médecins aujourd’hui ne cessent d’avertir sur les dangers d’une consommation d’alcool, même modérée.

Nunc est bibendum ?

Aujourd’hui comme hier, et si le vin n’est plus considéré comme la panacée universelle, et quel que soit l’usage thérapeutique, ou non, qu’on en fait, la consommation de vin doit toujours être placée sous le signe de la tempérance. Car rappelons-le, l’abus d'alcool est dangereux pour la santé, consommez avec modération !

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Sources

Histoire sociale et culturelle du vin, Gilbert Garrier, Larousse, Paris, 1998

 

Traités d'Hippocrate du régime dans les maladies aiguës ; des airs, des eaux et des lieux ; traduits sur le texte grec... par M. le chevalier de Mercy,..., Paris, 1818

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9672140p

Sur les Facultés des aliments, Claude Galien, Les Belles Lettres, Paris, 2013

L'art de conserver sa santé, composé par l'École de Salerne, Baillière, Paris, 1844

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k63935217

 

Pharmacopée universelle, Nicolas Lémery, L. d'Houry, Paris, 1716

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k98189048

Traité des maladies les plus fréquentes et des remèdes propres à les guérir, tome premier, Jean Adrien Helvétius, Le Mercier, Paris, 1724 http://www.biusante.parisdescartes.fr/histoire/medica/resultats/?p=4&cote=33120bx01&do=page

 

Oeuvres de Pasteur, tome 3 / réunies par Pasteur Vallery-Radot,...Louis Pasteur, Masson, Paris,1922-1939

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k73580

 

Calligrammes, Guillaume Apollinaire ; dessins de La Fresnaye, Mermod, Lausanne, 1952

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k9775732c

 

La Vache orange, d’après Nathan Hale, Flammarion, Paris, 2002

Soignez-vous par le vin, Docteur E. A. Maury, Editions du Jour, Montréal, 1975

Interview du Dr Maury par Stéphane Collaro, document INA : http://www.ina.fr/video/CPB7705092707/soignez-vous-par-le-vin-video.html

Le Vin, aliment de santé, Jean-Marc Carité,  Utovie, 1999

Vins et maladies cardio-vasculaires

http://www.oiv.int/public/medias/3303/5-1-18-cst-vin-maladies-cardio-fr.pdf