Les grandes périodes de l'industrie textile dans les Vosges

Les débuts de l’implantation textile dans les Vosges

La filature et le tissage se sont développés en Lorraine dès le milieu du XIII^e siècle. On travaillait alors la laine, le chanvre et le lin. Au XVIII^e siècle les activités de filature et de tissage à domicile se répandirent dans tout le département. Vers 1780, l’industrie cotonnière commença à voir le jour dans des établissements qui travaillaient le coton des Indes, d’Egypte et du Proche-Orient.

L’implantation des usines textiles dans les Vosges s’accéléra dans les années 1830. Les usines s’installèrent dans les différentes vallées profitant des anciennes installations de petits moulins et de forges dont les barrages, canaux d’amenés et autres installations hydrauliques permettaient de faire fonctionner un tissage en évitant de nombreux aménagements.

En 1845, les usines textiles des Vosges donnaient du travail à 11 500 ouvriers. On y fabriquait des calicots, des jaconas, des bazins, des percales, des damassés ou encore des jacquards. La fabrication des toiles de lin se concentrait, quant à elle, dans la région de Gérardmer. En 1861, cette activité occupait près de 1 500 ouvriers.

L’expansion de l’industrie textile dans les Vosges

Cette période qui s’étend de 1850 à 1914 fut une période prospère pour l’industrie textile vosgienne malgré quelques crises.

De 1861 à 1865, le secteur fut touché par la grande crise cotonnière provoquée par la guerre de Sécession américaine et le blocus entre les belligérants. En 1870, la guerre qui opposa la France à l’Allemagne et qui conduisit à la fermeture de la frontière entre l’Alsace et le département laissa pour un temps l’industrie textile vosgienne en difficulté.

En 1892, le vent tourne avec l’adoption de la loi Méline qui réinstaure un protectionnisme donnant un coup de pouce à l’industrie textile contribuant à son fleurissement à la Belle Époque. En 1905, l’École de filature et de tissage d’Épinal ouvre ses portes.  Avant 1914, il y eut peu des grèves dans l’industrie textile. 

La stagnation

La Première Guerre mondiale contraignit les usines à se réorganiser avec une main d’œuvre dépourvue des hommes partis au front. Les usines dans la zone occupée furent arrêtées et leur matériel saisi par les Allemands. Les autres usines travaillaient pour l’armée.

Au sortir de la guerre, des usines étaient détruites, d’autres n’avaient plus de matériel. Certains industriels comme Marcel Boussac y virent une opportunité de mettre la main sur bon nombre d’usines et de les remettre sur pied.

En 1929, comme beaucoup d’autres secteurs, l’industrie textile fut frappée par la crise tout droit venue des États-Unis qui entraîna une baisse des prix, une baisse des débouchés commerciaux et une diminution du pouvoir d’achat. La situation resta critique jusqu’en 1936.

Durant l’entre-deux-guerres, l’importance des débouchés coloniaux augmenta en réaction à la mondialisation et à la concurrence. L’industrie textile pris du retard sur la modernisation en se concentrant sur une production de masse de tissus standardisés convenant aux marchés coloniaux. Ce repli de l’industrie textile sur les colonies était dû à une politique qui persiste à être souverainiste, et qui a permis, provisoirement, de protéger le textile vosgien. 

La décroissance

Pendant la Seconde Guerre mondiale, face à l’impossibilité d’importer des matières premières, les usines durent trouver des solutions de remplacement telles que la fibranne. Plus la fin de la guerre approchait plus les usines fermaient leurs portes en raison du manque de matière première et du manque de charbon.

Au milieu des années 1950, le marché textile qui depuis le début du siècle se concentrait de plus en plus sur l’exportation dans les colonies (celle-ci représentait 90% des ventes de tissu de coton) fut confronté à la perte de ce marché en raison de la décolonisation. Une période de remise en question de l’industrie textile commença. Il était nécessaire de se moderniser et de rationaliser la production,  au travers d’un perfectionnement des machines entraînant inexorablement une diminution des ouvriers. De 1951 à 1968, 96 usines vosgiennes fermèrent leurs portes. Du milieu des années 1950 jusqu’au début des années 1990, la Lorraine textile perdit plus de 52 000 emplois (Source : Conseil Economique et Social de Lorraine, 1993).