Histoire

Les vitraux de la cathédrale de Metz

Edifiée de 1220 à 1522, de style gothique, la cathédrale Saint Etienne de Metz est la troisième cathédrale la plus élevée de France avec 42 mètres de hauteur. Elle possède la plus grande surface de vitraux de France: 6500 m2. Ils lui ont valu le surnom de "lanterne du Bon Dieu".

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Edifiée de 1220 à 1522, de style gothique, la cathédrale Saint Etienne de Metz est la troisième cathédrale la plus élevée de France avec 42 mètres de hauteur. Elle possède la plus grande surface de vitraux de France: 6500 m2. Ils lui ont valu le surnom de "lanterne du Bon Dieu".

L'art du vitrail

Les origines, la composition du verre et la fonction du vitrail

Comme dans toute les cathédrales gothiques, les verrières occupent la majeure partie de la surface latérale. Elles illuminent la nef, les jours de soleil. Les baies des transepts font chacune 424 m2. Ce sont les plus grandes verrières gothiques d'Europe.

1. Les origines

Le vitrail, sous sa forme la plus simple apparaît 4000 ans avant Jésus-Christ en Egypte, avec la découverte de la technique du verre. IL constituait le plus souvent un décor permettant la clôture des baies. Ainsi, l'assemblage de morceaux de verre blanc servait de fenêtre chez les Romains. Il avait aussi une fonction pratique : protéger contre les intempéries. Le vitrail en tant qu'élément coloré, figuratif et décoratif, émergera plus tard, probablement aux VIe-VIIIe siècle en Allemagne. L'utilisation du verre coloré va donner au vitrail une place importante dans l'esthétique. De plus, les méthodes de fabrication du vitrail n'ont quasiment pas évolué depuis l'Antiquité. En France, les premiers vitraux connus datent des VIIIe-Xe siècles. Mais l'art du vitrail ne prendra toute sa dimension qu'à partir du XIIe siècle. La première verrerie remonte à 1330. Le vitrage apprivoise la lumière. Au Moyen-Âge, les artistes en faisaient des vitraux et en 1900 des motifs décoratifs pour les cafés.

2. La composition du verre

Les vitraux sont des mosaïques de morceaux de verre de deux à quatre millimètres, de teintes différentes. Chaque morceau a sa propre teinte qui s'obtient par la cuisson d'un mélange de pâte de verre en fusion avec des oxydes métalliques comme l'oxyde de cuivre pour le rouge, par exemple. Ces verres sont présentés dans une monture de plomb qui contribue à cerner les différentes parties. Les ensembles gardent leur pureté et les vitraux brillent comme des pierres précieuses. La fabrication du verre s'effectue en quatre étapes : la charge, la fonte, le tisefroid, et le travail. Il se travaille pâteux et prend forme par soufflage. Le verrier utilise une canne (un tube de fer creux de deux mètres de long et d'un centimètre de diamètre à l'intérieur, muni d'un manchon). Les plus anciens vitraux de la cathédrale de Metz sont plutôt monochromes, dans des tons bleus, assez petits et datent du XIIIe siècle. Par la suite, les maîtres verriers, s'appuyant sur une technique plus affutée, se sont lancés dans le gigantisme. On peut citer trois grandes familles de verrrières qui coexistent : les verrières figurées qui représentent des personnages de la chrétienté, les verrières historiées qui illustrent des passages de la Bible ou de la vie des Saints et les verrières décoratives non-figuratives qui peuvent exprimer des motifs héraldiques (blasons ou armoiries).

3. La fonction du vitrail

Au Moyen-Âge il tenait un rôle important dans l'enseignement religieux des populations chrétiennes illettrées. Dans la cathédrale de Metz, les vitraux offrent cette particularité de laisser pénétrer la lumière sans jamais laisser voir l'extérieur. Ils définissent un espace entouré de chroniques lumineuses et d'images étincelantes, toutes dédiées à la gloire de la religion chrétienne. Toutes appellent le fidèle à oeuvrer pour le salut de son âme. Il sert à magnifier le message, à l'éclairer et à le transfigurer. L'iconographie de la cathédrale de Metz est centrée sur des grands thèmes de l'Ancien testament, des Evangiles et de la vie des Saints. Elle est avant tout un lieu de célébration des sacrements. Les images des vitraux ont pour fonction de rappeler la liturgie, les textes lus pendant l'office. On se laisse surprendre devant une telle abondance et complexité d'images. Mais on oublie souvent que le Moyen-Âge était imprégné en profondeur par la culture chrétienne et que la religion rythmait la vie quotidienne. On peut donc dire que cet art monumental majeur a dominé l'époque gothique, période où les techniques architecturales ont permis la multiplication des baies et leurs agrandissements, faisant du vitrail un art au service de l'Eglise. Ainsi, il a exprimé toute la symbolique chrétienne et il est devenu un élément essentiel à la création d'un univers mystique : la lumière divine.

 

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Les vitraux des XIIe et XIVe siècles

Les vitraux du XIIIe siècle et du XIVe siècle

Les vitraux gothiques sont l'expression de l'allégresse religieuse du Moyen-Âge. Ils enseignent, racontent, décrivent l'histoire des Saints, des Apôtres...et constituent de véritables encyclopédies religieuses.

1. Les vitraux du XIIIe siècle

Dans le transept sud, à gauche du grand orgue, de petits vitraux où domine le bleu remontent au XIIIe siècle et sont les plus anciens de la cathédrale de Metz. Ils représentent six scènes de la vie de Saint Paul et n'ont été installés à cet endroit qu'au XVIIIe siècle. Ils proviennent vraisemblablement de l'église Saint Paul qui faisait partie du groupe cathédral et qui fût démolie au XVIIIe siècle. Plusieurs roses du XIIIème siècle ornent les dernières travées des bas-côtés sud et nord de la nef. Cinq médaillons dans la dernière travée de chaque bas-côté représentent le donateur, l'annonciation, Saint Paul et Saint Etienne, la lapidation de Saint Etienne et le martyre de Saint Barthélémy. La rose de la troisième travée nord de la nef provient du vitrail du coeur de Notre-Dame-la-Ronde. Son médaillon central figure le couronnement de la vierge entourée d'anges aux mains jointes, portant couronnes ou encensoirs et qui occupent les six médaillons du pourtour.

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Médaillons de la cathédrale Saint-Étienne

2. Les vitraux de Hermann de Münster, "le maître"

En Lorraine, de tous les maîtres verriers connus, Hermann de Münster est sans conteste le plus célèbre. Il fut le maître d'oeuvre des vitraux de la cathédrale de Metz.

Au-dessus du grand portail de la façade se déploie la grande verrière occidentale de 350 m2. Elle comporte une grande rosace de onze mètres de diamètre, créée en 1384. Elle est marquée par une couleur dominante blanche. Le verre est teinté dans la masse et non plus peint (technique permettant d'alléger les coûts). Au centre et à l'extérieur, on trouve des couleurs plus soutenues. Le programme iconographique imposé par le Chapitre illustre la concordance entre les articles du Symbole des Apôtres et leur préfiguration dans l'Ancien Testament. La composition générale s'inspire de modèles rhénans et westphaliens.

Autrefois, la verrière occupait toute la hauteur de la façade occidentale de la cathédrale, à l'image des verrières du transept. Mais la partie inférieure a été obstruée au XVIIIe siècle pour la construction du premier grand portail. Hermann de Münster voulait montrer une progression : en bas les Prophètes, puis les saints et les Apôtres.On suppose que grâce à sa notoriété et à la reconaissance des chanoines, Hermann de Münster se fit accorder le droit de sépulture dans la cathédrale de Metz. Il fut inhumé en 1392, au pied de son chef d'oeuvre. D'ailleurs son épitaphe a été retrouvée en 1864, dans la première travée du bas-côté nord, nous apprenant qu'il venait de Münster (Wesphalie).

Les vitraux du XIIe-XIVe siècles forment le premier ensemble de la cathédrale de Metz. Hermann de Münster a été le premier maître verrier sollicité par le Chapitre de la cathédrale pour l'exécution des vitraux.

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Les vitraux de la Renaissance

Les vitraux du XVe siècle

Les vitraux du XVème siècle sont moins visibles : trois baies dans les fenêtres hautes et quelques vitraux dans le transept nord. Les deux tiers des verrières anciennes conservées remontent à la Renaissance. Elles marquent un âge d'or avec le début du vitrail-tableau (une technique assimilée à la peinture de chevalet). On la retrouve dans les oeuvres de Théobalt de Lixheim et surtout de Valentin Bousch.

1. Les vitraux de Théobalt de Lixheim, le moine artiste.

Théobalt de Lixheim ou Diebold von Lixheim est un peintre verrier originaire de Lixheim , né vers 1455 et mort vers 1505 au cours d'un voyage en Saxe.Il est intervenu sur la face nord du transept de la cathédrale de Metz. Il va signer cette magnifique verrière achevée en 1504, offerte par l'évêque Henri de Lorraine. Elle a été transformée en 1879 par la maison Schmitz-Reuters d'Aix-la-Chapelle, puis en 1879-1909 par Fritz Geiges de Fribourg-en -Brisgau. La partie de la verrière qui lui est attribuable compend des vitraux du tympan, le registre intermédiaire représentant huit saintes avec l'inscription de Théobald de Lixheim, et le registre supérieur huit saints. Le tympan comprend dans les quatre quardrilobes les quatre évangélistes, et au-dessus le couronnement de la Vierge, des anges musiciens, des anges portant les instruments de la Passion dans la rose. L'ensemble représente le triomphe de la Vierge au Paradis.

Il semble que le registre inférieur ainsi que le tympan ont été l'oeuvre d'un peintre-verrier de l'entourage de Thomas de Clinchamp et non de Théobald de Lixheim. Les vitraux dans les lancettes illustrent huit apôtres avec les articles du Credo sous leurs pieds et les scènes de leur martyre.

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Metz : intérieur de la cathédrale

2. Les vitraux de Valentin Bousch "le seigneur de la Renaissance"

Né vers 1490 à Strasbourg et mort en août 1541 à Metz, Valentin Bousch est considéré comme le plus grand maitre verrier et peintre de la Renaissance lorraine. Le 15 septembre 1518, il devint le verrier attitré de la cathédrale de Metz, ville dans laquelle il installa son atelier près du grenier de Chèvremont. Il y réalise à partir de 1520, notammant sur commande du Chapître, la majeure partie des verrières du choeur sud du transept, achevée en 1539.

La grande verrière du bras sud du transept est considérée comme le chef-d'oeuvre de Valentin Bousch (1521-1527). Une partie des verrières des absides lui sont attribuées bien que non signées.

La première chose qui frappe lorsqu'on regarde ces vitraux, ce sont ses couleurs très vives : jaune, rouge, bleu et vert. On observe trois étages et, à chaque étage, sont représentés huit saints et évêques. Au-dessus se trouve une fresque d'anges aux prises avec des serpents, puis quatre quadrilobes représentant quatre docteurs de l'Eglise latine. Au sommet flamboie une rosace rouge et jaune à seize branches. Son oeuvre représente ses donateurs, le doyen du Chapitre, Otto Savin et son neveu Evrard Marlier. Les trois baies axiales du choeur furent directement financées par le cardinal Jean de Lorraine (fils de René II de Lorraine), qui se fit représenter au centre devant le martyre de Saint Etienne. De part et d'autre de cette scène sont figurés René II et Antoine avec leurs épouses respectives. En raison de la hauteur de ces verrières, l'observation des personnages est malaisée.

Il a également réalisé de nombreux vitraux sur commande de la bourgeoisie messine pour des églises, des hôtels, des chapelles messines...Avant de travailler pour la cathédrale de Metz, il a oeuvré pour la basilique de Saint-Nicolas-de-Port, siège d'un pèlerinage fréquenté.

Son style emprunte beaucoup de ses traits à l'art germanique, en particulier à Hans Baldung Grien, qui était certainement son mentor. De plus, les figures des personnages possèdent de fortes parentés avec la peinture allemande contemporaine.

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Vitraux de Valentin Bousch

 

On constate, qu'avec 17 ans d'écart, les deux maîtres verriers ont deux styles différents. La verrière de Théobald de Lixheim est ancrée dans le style gothique, très semblable à celle d'Hermann Münster, avec des personnages figés dans un décor architecturé élancé. Celle de Valentin Bousch est tournée vers la Renaissance où les personnages évoluent deux par deux, dans une architecture typiquement italienne, avec un début de perspective et des couleurs plus vives et claires.

 

 

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Les vitraux contemporains

Les vitraux contemporains, l'appel à la création

Au XIXe siècle, on assiste au développement du plus grand atelier de peinture sur verre de France, avec Laurent-Charles Maréchal. Mais l'entrée des Prussiens à Metz et l'annexion allemande provoqueront son déclin. Entre 1842 et 1872, son atelier avait restauré les principales verrières de la cathédrale de Metz et créé de nouveaux vitraux pour le choeur et la chapelle des évêques.

Après la Seconde guerre mondiale, quelques architectes en chef des Monuments historiques, auxquels incombait la charge de remplacer par des verrières neuves celles détruites par la guerre, comprirent les possibilités offertes par la peinture-vitrail. Ils ont su faire appel aux meilleurs artistes contemporains. Les vitraux du XXe siècle sont sans doute les plus connus avec des artistes de renom comme Jacques Villon, Roger Bissière et Marc Chagall.

1. Les vitraux de Jacques Villon, le géomètre de la couleur.

Jacques Villon, de son vrai nom Gaston Duchamp (1875-1963) est peintre, dessinateur et graveur français. Il est l'aîné d'une prestigieuse famille d'artistes, dont le frère cadet Marcel est devenu la figure de proue de l'art contemporain.

Robert Renard, l'architecte en chef, aidé de Jacques Dupont, inspecteur des Monuments historiques, vont imposer Jacques Villon qui va réaliser les cinq baies vitrées de la chapelle du Saint Sacrement, sur le côté sud de la nef (1956-1957) de la cathédrale de Metz. Octogénaire, le peintre accepte de s'essayer pour la première fois au vitrail. Le choix de Jacques Villon a quelque peu rassuré les autorités religieuses. En effet, connu pour sa discrétion, il ne faisait partie d'aucun groupe contestataire ou radical comme les surréalistes ou les dadaïstes notamment.

Peintre de la lumière et géomètre de la couleur, il se plie au caractère sacré de la commande, avec cinq thèmes précis : l'Exode, la Cène, la Crucifixion, les noces de Cana et le rocher de l'Horeb. Les vitraux ont été exécutés par l'atelier de Charles Marq, Brigitte et Jacques Simon à Reims (maître-verrier de père en fils depuis 1640). Il parvient à rehausser une chapelle ordinaire grâce à ces cinq baies vitrées, dont l'iconographie rappelle l'eucharistie, à travers des séquences de l'Ancien et du Nouveau testament.

Mais c'est le thème de la crucifixion du Christ dans le vitrail axial qui va révéler son exceptionnel talent et l'originalité de son travail. Il s'est inspiré de l'évangile de Saint Jean relatant l'évènement de la lance portée par un soldat romain qui va percer le côté de Jésus. Avec cette lance, il va créer un axe déitique en réalisant une perspective qui traverse le Christ, mais également le spectateur lui-même. De même, à la manière d'un Piero della Francesca pour ses fresques d'Arezzo, il va faire de la croix le symbole de tous les croisements : "le passé et le présent, la séquence et le symbole, l'objet dans l'espace et la position du spectateur par rapport à cet objet".

Cette vision pyramidale et triangulaire que l'on retrouve en particulier dans la lance et la chaîne syntagmatique de la croix, lui a permis de mettre le cubisme au service d'une dimension proprement théologique. Malgré leur indéniable qualité, les vitraux de Jacques Villon restent encore aujourd'hui dans l'ombre de ceux réalisés par Marc Chagall. Ce sont les seuls et uniques vitraux faits par le peintre au cours de sa vie.

2. Les vitraux de Roger Bissière, le peintre de la lumière.

Roger Bissière (né le 22 septembre et mort le 2 décembre 1964) est un peintre français de la nouvelle Ecole de Paris. C'est en 1960 que Roger Bissière créé les deux verrières des tympans nord et sud de la cathédrale Saint Etienne de Metz. Après les cinq baies vitrées de Jacques Villon, c'est donc au tour de Roger Bissière de marquer sa présence dans ce haut lieu culturel. Il est le premier artiste à réaliser des vitraux non-figuratifs pour une cathédrale, s'inscrivant dans la mouvance abstraite. En 1960, il crée les maquettes des deux verrières. Discrète, son oeuvre est presque éclipsée par la luxuriante iconographie de Jacques Villon. C'est un vitrail aux couleurs bleu, jaune, rouge et vert. Son style est très différent de Jacques Villon ou de Marc Chagall. En effet il fait abstraction des formes et des figures. Son oeuvre est tout simplement harmonieuse , des taches de couleurs comme des mosaïques aux tons froids, bleutés côté nord et orangés côté sud. Elle exalte tout particulièrement l'embrasement mystique. Ce peintre de la lumière, sensible au "cantique de Frère Soleil" de Saint François d'Assise, réussit à restituer l'illumination intérieure des êtres et des choses, selon une formule qu'il affectionnait: " une création tissée de lumière".

Les deux baies vitrées rappellent les débuts de la création, notamment ce quatrième jour selon la Bible, où apparaissent les deux luminaires au firmament des cieux pour séparer le jour et la nuit. Du fait de leur situation et de leur exposition, ces baies irradient la lumière à l'image de la lune pour le côté nord et à l'image du soleil pour le côté sud grâce à ses deux ouvertures opposées de la cathédrale de Metz. Elles nous invitent à contempler en permanence la nuit et le jour et nous rappellent le passage des ténèbres à la lumière, de la mort à la Résurrrection.

Le peintre avec sa palette de couleurs va nous signifier ces deux mondes. Ainsi la verrière du tympan nord est dominée par les bleus froids évoquant le monde de la nuit alors que le tympan sud célèbre le monde du jour avec ses ocres radieux.

Dans son oeuvre souvent énigmatique, Roger Bissière surprend par l'émergence de signes qu'il nous propose de voir, ceux-ci pouvant s'apparenter parfois à des pictogrammes.

Avec ses vitraux, il nous plonge par la richesse du chromatisme de son oeuvre, au coeur d'une autre réalité, celle que l'on peut savourer par la richesse, l'éclat et le frémissement de ces parcelles lumineuses. Par la dimension musicale de son oeuvre il nous fait accéder à l'infini, suivant en cela Beaudelaire qui assure que "la musique creuse le ciel" et que le peintre doit faire tenir "l'infini dans le fini".

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Vue de l'intérieur de la cathédrale

3. Les vitraux de Marc Chagall, le passeur de lumière.

Marc Chagall (1887-1985) est un peintre et graveur d'origine russe. Il s'est aussi essayé à la sculpture, à la poésie, au vitrail, à l'émail... Son oeuvre, sans se rattacher à aucune école, présente des caractéristiques du surréalisme et du néo-primitisme.

En 1959, Marc Chagall accepte de peindre les cartons des trois baies du déambulatoire nord, après avoir déjà expérimenté cet art à Chartres et à Assy. Le peintre puisera ses sujets dans des épisodes de l'Ancien Testament. Elles seront installées entre 1961 et 1965.

Les récits tirés de la Genèse et de l'Exode se succèdent : de la création d'Adam et Eve, le Péché originel...au sacrifice d'Isaac, surmonté par Noé, dansant sous-l'arc-en-ciel jusqu'aux lamentations de Jérémie, l'évocation de la lutte de Jacob, de Moïse et les tables de la loi, le roi David jouant de la Lyre à Bethsabée... En magicien, Chagall nous invite à entrer dans le récit biblique par les couleurs et leur éclat de lumière. Son univers biblique et onirique est admirablement mis en valeur par le savoir-faire de l'atelier de Simon-Marq à Reims. L'oeuvre, d'une grande liberté, met à contribution toutes les ressources de la gravure et de la peinture sur verre. Les couleurs, du bleu surnaturel au vert cosmique, en passant par le rouge mystique et le jaune paradisiaque, inondent les baies vitrées.

Ici le génie du peintre s'exprime dans l'art du verre. "Le vitrail transmue la lumière physique en lumière spirituelle" déclarait-il et répondait à un mal-être profond ressenti par l'artiste. "Le monde où je vis est fermé" confiait-il. Avec le vitrail, il avait trouvé un moyen d'ouverture où le monde s'ouvrait à la lumière.

De nouveau sollicité en 1968 et 1970, il réalise les verrières du triforium du croisillon nord. Il imagine une iconographie en relation avec la Genèse. Le cycle se déroule dans les quatre lancettes, depuis l'ange dans le rouge de la création, jusqu'à un autre ange dans le bleu de l'expulsion de l'Eden et à une luminescence du jaune...La beauté de ces vitraux se manifeste encore au triforium : l'artiste déploie des branches et des rameaux, habités d'oiseaux, de papillons aux coloris subtils...

"Ceux qui voudront les voir les chercheront" disait Chagall de ses vitraux, vexé de les voir relégués dans un transept, dans le déambulatoire nord de la cathédrale de Metz (fermé en 1960 au public). Aujourd'hui, le public sait parfaitement les trouver. Les bleus de Chagall font partie des vitraux les plus admirés de la cathédrale avec les jaunes.

Dans la nuit du 10 août 2008, un ou des voleurs se sont introduits de nuit dans la cathédrale en cassant la partie basse du vitrail de la Création. Ces verres jaunes avaient été spécialement conçus pour Chagall par les verreries Saint-Just (Rhône), appelés "le jaune Chagall".

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Le vaisseau central

On peut donc constater que la cathédrale de Metz est le premier édifice classé Monument historique à recevoir des vitraux d'artistes contemporains. Robert Renard a fait preuve d'audace en faisant appel à des peintres modernes, ainsi que des hommes d'Eglise éclairés comme le Père Couturier, qui ont accepté ces artistes (même non-croyants). le Père  Couturier estimait "qu'ill valait mieux s'adresser à des hommes de génie sans la foi qu'à des croyants sans talent". La cathédrale de Metz a également bénéficié du renouveau du vitrail français après la Seconde Guerre mondiale, en particulier grâce à Marc Chagall. Celui-ci s'est fait l'écho des maîtres verriers médiévaux.

Du 21 novembre 2020 au 15 mars 2021, le Centre Pompidou-Metz consacre une exposition à Marc Chagall, explorant l'importance du vitrail dans l'oeuvre de l'artiste. Elle est conçue en partenariat avec le musée national Marc Chagall de Nice, où elle sera présentée dans une version renouvelée du 24 avril au 30 septembre 2021.

 

 

 

 

 

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La cathédrale de Metz

Vitraux de la cathédrale de Metz

La cathédrale de Metz est incontestablement un joyau architectural surmonté dans un écrin de verre, qui en fait l'édifice religieux le plus lumineux et le plus ajouré depuis le Moyen-Âge. Sa singularité est d'avoir su offrir une large chronologie, allant de la période médiévale aux créations contemporaines. De plus, introduire l'art contemporain dans une cathédrale n'était pas évident dans les années de l'après-guerre. La cathédrale de Metz qui accueille chaque année plus de 700 000 visiteurs, a fêté ses 800 ans en 2020. A cette occasion, l'Etat a sollicité l'artiste coréenne Kimsooja pour réaliser "le premier vitrail du XXIe siècle dans le triforium de la Sainte-Chapelle" par le biais d'une commande publique.

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Vitraux de la façade occidentale près de la statue de Notre-Dame de Bon-Secours, détail

Sources:

Ouvrages

"Les vitraux de la cathédrale de Metz" de Philippe Hiegel (1993). 

"Lorraine", Gallimard loisir (2007)

"Metz : oratorio pour une cathédrale" de M.A. Kuhn-Mutter (2011)

"La Lorraine" de Bruno Barbier (2018)

Liens :

https://www.tourisme-lorraine.fr/a-voir-a-faire/visites/sites-et-monuments/

https://www.centrepompidou-metz.fr/chagall-le-passeur-de-lumi-r

https://aladecouvertedenotrepatrimoine.blogspot.com/2015/04/les-vitraux-de-la-cathedrale-de-metz.html

https://www.tourisme-lorraine.fr/a-voir-a-faire/visites/sites-et-monuments/838145823-vitraux-de-la-cathedrale-saint-etienne-metz

https://www.youtube.com/watch?v=Hc-HRkuw0Iw