Histoire

L’Esplanade et le jardin Boufflers : élégance et exubérance

Il existe au cœur de la ville de Metz des jardins où l’on prend plaisir à se promener et à s’arrêter, sans forcément penser aux nombreuses transformations que ceux-ci ont connu au fil de l’histoire. Ce sont les jardins de l’Esplanade et de Boufflers.

Contenu du L’Esplanade et le jardin Boufflers : élégance et exubérance Contenu du L’Esplanade et le jardin Boufflers : élégance et exubérance

Il existe au cœur de la ville de Metz des jardins où l’on prend plaisir à se promener et à s’arrêter, sans forcément penser aux nombreuses transformations que ceux-ci ont connu au fil de l’histoire. Ce sont les jardins de l’Esplanade et de Boufflers.

Un jardin à la française

L’Esplanade Cour Napoléon

Ce long rectangle a été aménagé au début du XIXe siècle sur les anciens fossés de la Citadelle comblés en 1816. Une esplanade est un terrain plat et dégagé devant une citadelle, destiné à faciliter des tirs de défense. À Metz, elle sera un jardin à la française dessiné par l’ingénieur Gérard Vandernoot. Les allées, les massifs, les deux mails de tilleuls et de marronniers, les parterres, les décorations florales en suivent les principes : la beauté naît de la rigueur, l’ordre, l’équilibre et la géométrie.

 

Deux kiosques très différents

En 1852, un kiosque tout à fait charmant est imaginé en son centre par Gérard Vandernoot. Il est réalisé par le ferronnier d’art messin, Dominique Pantz. Le toit, bordé de lambrequins ajourés, se pose sur huit colonnettes. Des concerts y sont donnés par l’harmonie municipale, parfois même une messe (1870). Mais le kiosque est démoli en 1940 par les Allemands afin d’en récupérer le métal.

Un second kiosque voit néanmoins le jour après la guerre, situé plus près de l’École des Beaux-Arts. Sa conception s’avère beaucoup plus sobre : un simple hexagone au toit de toile. Il est détruit à son tour à l’occasion des travaux effectués pour le nouveau parking après avoir été une petite scène musicale entre 1956 et 1990.

undefined
[Festivités à l’Esplanade]
Contenu du L’Esplanade et le jardin Boufflers : élégance et exubérance Contenu du L’Esplanade et le jardin Boufflers : élégance et exubérance
Les origines d’un nouveau style architectural : une loi, des rêves, et un peu d’eau

La fontaine de l’Esplanade

Une loi du 22 avril 1850 est promulguée afin d’éradiquer les logements insalubres. À la puanteur d’une ville faite de bras morts et d’élevages de poules, on répond hygiénisme. Il faut nettoyer la ville. Il faut de l’eau. Et cette eau viendra de Gorze. La fontaine et son jet sont l’aboutissement d’un long travail (1858-1865). On dénombrera à l’époque 24 fontaines, 14 fontaines de fonte et 24 bornes-fontaines à Metz.

 

Rêves fous

Le 5 février 1879, Auguste Migette, en promenade au jardin botanique, espéra qu’un jour il pourrait « faire le long du canal de la Moselle, une continuation du jardin botanique partant de celui-ci et se reliant à l’Esplanade par des plans inclinés ou par des escaliers ». Dans un rapport de 1904 diligenté par le maire, on imagina des terrasses, des volées d’escaliers, des fontaines. On souhaitait « un espace verdoyant extrêmement agréable avec des chemins de promenades montants et descendants, des escaliers et des points de vue gracieux ».

Depuis le Second Empire, les jardins parisiens avaient versé dans l’artifice : lacs, cascades et rochers étaient entièrement fabriqués pour faire partie de décors exubérants et tortueux. Les projets pour Metz vont dans le sens de la débauche avec de nombreuses « fabriques » mais le choix définitif reste assez raisonnable. Le rêve prend forme, au prix de travaux d’une formidable ampleur. Et les derniers remparts de la Citadelle sont démolis. Au centre de Metz, des fontaines d’un nouveau genre voient le jour.

 

Contenu du L’Esplanade et le jardin Boufflers : élégance et exubérance Contenu du L’Esplanade et le jardin Boufflers : élégance et exubérance
Des fontaines baroques

La Nymphée aux grenouilles (1905)

Une Nymphée est originellement une grotte naturelle ou artificielle abritant une source ou une fontaine sacrée dédiée aux nymphes. La nôtre s’adosse à une balustrade et est encadrée de deux volées d’escaliers. Sa fontaine se situe dans une niche garnie de stalactites et son eau se déverse dans trois bassins superposés. Côté face, un bas-relief présente des grenouilles musiciennes ricanantes. Côté pile, on découvre un bestiaire monstrueux. Ces figures appartiennent à l’univers des contes de Grimm, à l’imaginaire angoissant relié à l’enfance, à l’inconscient et aux peurs anciennes. Leur but est d’effrayer et de mettre mal à l’aise le promeneur.

 

Le grand Nymphée de l’Esplanade, ou Fontaine de l’Empereur (1905-1906)

L’Esplanade aux lignes si régulières se termine par une large terrasse encadrée par deux escaliers, sous laquelle sont enchâssées trois grottes posées dans un bassin. Chaque grotte comporte une clé ornée d’un écu qui symbolise la prospérité issue de l’agriculture et du commerce. Cette fontaine a été imaginée dans l’esprit « neue Wasserkunst » (nouvel art aquatique). Elle est dotée de stalactites, de rochers, de rocailles et d’un bestiaire fantastique et aquatique.

Ces fontaines mêlent habilement sculpture, jeux d’eau, flores locale et exotique, mais ce style architectural, plus proche du Jugendstil expressif et brut que de l’Art nouveau floral et harmonieux, fut considéré par beaucoup comme « rococo » ou « de mauvais goût ». Cependant le temps a fait son œuvre et elles font désormais partie des images les plus reconnues de Metz.