Contenu du Le Chat Botté : un conte ambigu

L’Ordre Etabli  : Reflet et critique ?

Lorsqu’il écrit le Chat Botté, Charles Perrault est membre de la Cour de Louis XIV. D’ailleurs, c’est Elisabeth-Charlotte d’Orléans, sa petite nièce, qui reçoit en cadeau le premier exemplaire, richement relié et illustré, du manuscrit. 

La situation du conte trouve son origine dans l’application du droit d’aînesse qui, tout en évitant l’émiettement des richesses, laisse les plus jeunes héritiers dans le dénuement.
Les signes  de la naissance noble sont ici : la possession d’un château et de terres, la riche alliance et les riches vêtements. Le chat œuvre alors pour les obtenir pour son Maître.

C’est lui, le chat, qui se montre habile courtisan et politique : il corrompt les paysans, manipule l’ogre et ment au roi. Il devient alors, à la fin, grand seigneur et ne pense qu’à se divertir. S’agit-il là d’une critique des puissants oisifs ?

 

Deux morales : ambiguïté ou non-sens ?

 

Bizarrement, le Chat Botté comporte deux morales.

Apparemment, l’auteur y vante à la fois l’importance des apparences et du travail pour réussir. Pourtant, si la première condition s’applique à une princesse naïve et superficielle, il n’en est rien de la seconde. En fait, le conte fait l’apologie de la ruse et de la débrouillardise.

L’incongruité de ces deux morales explique qu’elles soient souvent absentes de nombreuses versions du conte. Certains ont émis l’hypothèse qu’elles aient été rajoutées à la toute fin et seraient la marque d’un jeu de lecture lettrée. L’histoire mettrait alors en scène la rivalité de deux conteurs : le narrateur et le Chat menteur.

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Un récit initiatique ?

 

Dans sa lutte contre l’injustice, le mal, le monstrueux et la magie, le Chat, double en quelque sorte du fils du meunier, subit des épreuves dont il sort vainqueur grâce à son intelligence.

Une des conditions est le passage d’un lieu à l’autre, un cheminement géographique effectif, signe du récit initiatique.

Le chat représente une force que le fils du meunier a héritée de son père. Chaque action est alors une étape vers la réalisation de soi. Il s’agit de la confection et du don de bottes, de la scène de la noyade qui symbolise une fausse mort, de la renaissance par le don d’habits royaux, enfin de la lutte contre l’ogre.

 

L’univers et la symbolique du conte  


Dans les contes, l’ogre est souvent connu pour sa bétise et sa gloutonnerie. Ici, son pouvoir de se métamorphoser a donné naissance à l’interprétation d’un combat entre deux magiciens, lui et le chat.
Dans les contes, les règles sont différentes, inversées. Ainsi, c’est le chat qui se tient debout sur ses deux jambes et parle comme un homme et cela semble admissible. Ses bottes aussi, lui permettant de se protéger de la saleté et de se déplacer plus facilement- plus rapidement ? – font de lui un être au-dessus du commun.


Si on se réfère à la division tripartite de Georges Dumézil, le héros représenté par son chat, doit incarner et transcender les trois fonctions : sacerdotale, guerrière et productive ; on les retrouve dans le mariage royal, le combat contre l’ogre et la rencontre avec les moissonneurs. 
On peut imaginer que le fils du meunier épouse la fille du roi car ce dernier est incapable d’accomplir la fonction productive, ses terres étant sous l’emprise des forces de la nature symbolisées par l’ogre.

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