Les livres d'heures de Limédia
L'office des morts dans les livres d'heures
Au cours des XIVe et XVe siècles, la mort est partout en Europe ! Les épidémies de peste, les guerres – particulièrement celle de Cent Ans – et les épisodes de famine déciment la société médiévale. Les mentalités vont être marquées par ces phénomènes macabres où jeunes et vieux, riches et pauvres, sont frappés indifféremment. Dès lors, la mort – et ses représentations – vont faire leur apparition dans les arts et la littérature mais aussi dans les livres d'heures : Ars moriendi, danses macabres ou ornements de l’office des morts.
Dans les livres d’heures, la lecture de l’office des morts servait à commémorer la mémoire d’un proche décédé ou à prier pour le propre salut de son âme. Il démontre la crainte d'une mort sans pénitence et le besoin de bien s'y préparer tout au long de sa vie pour accéder au paradis. Cet office, issu du bréviaire, est composé de trois heures : vêpres, matines et laudes. Il débute habituellement par le psaume 114 « Dilexi quoniam exaudiet dominus… » et contient un ensemble de psaumes et de textes de saint Luc et du Livre de Job. Il s’ouvre généralement sur une enluminure représentant des scènes d’inhumation, des allégories de la Mort, l'Enfer, Job sur son fumier ou la Résurrection du jeune Lazare.
La Résurrection de Lazare
Cette scène biblique, issue de l'Évangile selon saint Jean, est traditionnellement utilisée pour illustrer l'office des Morts. Elle raconte la façon dont Jésus-Christ a ramené à la vie son ami Lazare de Béthanie.
Sur cette enluminure, Lazare sort de son tombeau, à sa droite se tiennent ses deux soeurs, Marie et Marthe, et sur sa gauche Jésus et une foule de juifs venus assister au miracle. Conformément au texte biblique, Lazare est libéré de ses liens à sa sortie du tombeau. En bordure marginale, l'enlumineur a peint un papillon symbolisant dans l'iconographie chrétienne l'âme du défunt quittant son corps.
La Résurrection de Lazare
Sur cette enluminure, alors que Jésus ordonne : "Lazare, sors !", ce dernier se tient debout dans son cercueil, dont le couvercle, orné d'un gisant, est ouvert. L'une de ses soeurs et deux autres personnages observent la scène derrière l'épaule de Jésus. Dans la bordure marginale, le paon déployant ses plumes en une parfaite roue symbolise l'immortalité dans l'iconographie chrétienne .
Job sur son fumier et la Mort frappant
Au premier plan de l'enluminure, la Mort frappe un homme jeune et riche dans un cimetière (croix, ossements et cercueil). Sur les colonnes de l'encadrement architectural, des scultpures représentant des squelettes renforcent la présence de la mort.
En arrière plan, Job, autre figure biblique souvent utilisé pour ouvrir l'office des Morts à partir de la fin du XVe siècle, est ici présenté sur son tas de fumier accompagné de ses trois amis et de sa femme qui le raillent. Cet homme riche et pieux, qui se voit frapper d'une série de calamités, reste constant face à sa foi. Il était donc un modèle à suivre - d'où sa présence dans l'office des morts.
La mort terrasse un chevalier
Sur cette enluminure la mort représentée sous la forme d'un transi menace un chevalier de sa lance. En arrière plan, un Christ en croix est le symbole de résurrection et l'espoir du salut de l'âme.
Pour renforcer cette présence de la mort, l'enlumineur a peint dans la première lettrine de la page une tête de mort.
Memento mori
Le memento mori a pour but de rappeler que tous les hommes vont mourir - même les plus riches et les plus puissants comme le suggère cette enluminure où au premier rang sont représentés, de gauche à droite : le pape, l'empereur, un roi, un cardinal et un évêque. La Mort, sous la forme d'un transi, est montrée ici triomphante face à la foule qu'elle terrasse.
En marge, une jeune fille en belle toilette, probablement la propriétaire du livre, Perrette Baudoche, est également entraînée par la Mort qui a pris la forme d'un cadavre décharné.
Une âme menacée par l'Enfer
Cette enluminure reflète la vision de l'homme sur l'Univers.
Le réveil du défunt, placé au cœur de l’image, représente le royaume des vivants. De part et d’autre de cet espace se situent les demeures éternelles. Dans l’espace supérieur de l’image, le Paradis est représenté comme un lieu paisible grâce à la dominante de la couleur bleue et par le sourire de Jésus-Christ. À ce lieu, dans la partie inférieure, s’oppose une gueule béante, porte de l'Enfer d'où s'échappe quelques créatures monstrueuses.
Le sentiment d'effroi face à cette représentation de l’Enfer est renforcé par la bordure rouge écarlate parsemée d’ossements humains et par un semé de larmes évoquant le chagrin.