Le parc de la Louvroie à Golbey

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15 juillet 2021 par Laury ZINSZ

Le Capitaine Ferber arrive aux alentours d’Épinal au début des années 1910 et installe ses quartiers sur le plateau de la Louvroie. Pendant la Première Guerre mondiale, il effectue plusieurs missions de bombardement avant d’être abattu par l’armée ennemie. À son arrivée, il n’avait pas conscience de son destin funeste et était encore bien à l’abri dans son hangar de 25 mètres de haut, gardé par deux hautes portes de 28 tonnes chacune. Drôle d’habitation pour un officier ? En effet ! Le Capitaine Ferber était en réalité un dirigeable de 74 mètres de long. 

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Épinal, Dirigeable Capitaine Ferber sortant de son hangar

Il était impressionnant ce Capitaine avec ses deux moteurs de 100 chevaux et son enveloppe remplie de 6 000 m3 d’hydrogène.

L’épopée du dirigeable 

Le premier dirigeable fut créé en 1789 par le jeune officier Meusnier. Il imagina la forme allongée, la nacelle et les hélices actionnées par une mécanique à bras. Son projet fut jugé bien trop onéreux par le souverain de l’époque, Louis XVI, et son idée fut mise de côté pour un temps. Ce n’est que plus de cinquante ans plus tard, en 1851, qu’Henri Giffard fut le premier homme à se risquer à bord d’un dirigeable. À la fin du XIXe siècle, les frères Gaston et Albert Tissandier introduisirent une évolution notable, l’usage de l’électricité pour actionner les hélices.


L’État français se lança alors dans l’aventure des dirigeables et dégagea des fonds pour encourager les recherches de Charles Renard (s’occupant de la partie aéronautique et électrochimique) et de son acolyte le capitaine Krebs (s’occupant de la réalisation du moteur). Le 9 août 1884 eut lieu le premier vol du France long de 50 mètres, large de 8,4 mètres et équipé d’une nacelle en bambou de 33 mètres. La prochaine évolution du dirigeable fut l’ajout du moteur à explosion. C’est suite aux travaux successifs d’hommes fortunés passionnés par l’aviation, Santos-Dumont et les frères Lebaudy, que le dirigeable devint (littéralement) dirigeable et utilisable en toutes circonstances.


En 1905, l’État acquiert un Lebaudy. Ainsi, le chemin du dirigeable croisa celui de l’armée. Le Patrie, premier dirigeable « de guerre », échappa à tout contrôle et s’envola seul. Son petit frère Le République connut lui aussi un destin funeste puisqu’après quelques manœuvres il termina sa course à huit kilomètres de Moulins en causant la mort de tous ses passagers. Malgré ces quelques incidents, la France fabriqua des dirigeables pour d’autres pays européens. En Allemagne, un mouvement similaire s’opère en la figure de Ferdinand von Zeppelin, qui contribua au développement des dirigeables dans son pays. Lorsque la guerre éclata en 1914, les aérostiers allemands larguèrent plus de 200 tonnes de bombes sur la France, la Pologne, l’Angleterre et la Belgique. Lors de ces opérations deux tiers des zeppelins allemands furent abattus causant la mort de la moitié des leurs aérostiers. L’utilisation des dirigeables pendant la guerre contribua à l’amélioration de leurs performances et leurs dimensions. En 1918, le Zeppelin L70 mesure 210 mètres et peut voler à 130 km/h à une hauteur de 7 000 mètres. 
 

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Épinal, Parc de la Louvroie, Hangars pour Dirigeables

Le parc de la Louvroie à Golbey 

Les débuts de l’aérostation à Golbey s’effectuèrent avenue de Beaulieu dans un parc à ballons. Il était situé à la Gosse en zone urbaine. Lorsque l’armée décida de construire un nouvel hangar pour dirigeables que le parc à ballons ne pouvait accueillir, on affecta au département de la guerre 52 ares de la forêt domaniale du Souche. Les travaux de construction du parc de la Louvroie prirent deux ans. En 1910, on adjoignit au hangar un casernement pour les aérostiers. Ces constructions furent baptisées « Quartier Renard », en hommage à Charles Renard, mentionné plus haut. 
Le Capitaine Ferber, nommé ainsi en l’honneur du pilote originaire de Lyon, Ferdinand Ferber, se posa sur le terrain de la Louvroie le 24 juin 1912 après avoir été monté et gonflé dans la ville de Toul. Il effectua sa première sortie officielle le 27 juin de la même année commandé par le Lieutenant Joux. 
 

Épinal, Le Dirigeable "Capitaine Ferber", Le Lieutennat Joux, Commandant du Bord, à son Poste de Pilote […]

Peu de temps après l’arrivée du Capitaine, un second hangar fut construit afin d’accueillir des dirigeables plus imposants. Ainsi, le 26 août 1913, le Commandant Coutelle pu faire son arrivée à Golbey et installer ses 96 mètres de long ainsi que son enveloppe remplie de 10 000 m3 de gaz dans le tout nouvel hangar. Ce dirigeable doit aussi son nom à un personnage bel et bien réel : Jean-Marie Coutelle

Épinal, Le Dirigeable "Commandant Coutelle" entrant dans son hangar de la Louvroie

Le parc de la Louvroie devint alors un lieu de formation pour les aérostiers, ainsi qu’un atelier de montage de dirigeables. 
Lorsqu’en 1914 l’Allemagne déclara la guerre à la France, les dirigeables de la Louvroie furent mis à contribution pour bombarder et observer les ennemis. Le Capitaine Ferber fut abattu lors d’une mission d’observation à proximité de la frontière alsacienne. Le Commandant Coutelle connut le même sort à Verdun. Peu à peu, les avions remplacèrent les dirigeables dans les hangars de la Louvroie. En 1918, le hangar du Capitaine fut démonté et envoyé dans le Var pour aider à la lutte anti-sous-marine. Le parc fut utilisé jusqu’à l’aube de la Deuxième Guerre mondiale avant d’être abandonné et démonté dans les années 1950. Aujourd’hui, il n’en reste presque aucune trace. 

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