Contenu du La famille Majorelle

Louis Majorelle (1859-1926)

Ce portrait de Louis Majorelle, encore jeune, probablement aux environs de 1900, est très explicite sur sa fonction sociale. La blouse blanche dit le travail du dessinateur mais aussi le labeur de l’ébéniste, et le point de vue photographique est bien celui d’un portrait d’artiste. L’homme est cela tout à la fois. La nature est sa bibliothèque et son étude une nécessité dans la conception et la production du meuble d’art.

Louis Majorelle est né à Toul en 1859. Il est le fils d’un décorateur sur faïences (Auguste, 1825-1879), Lunévillois d’origine, au talent vite remarqué qui lui vaudra, dès les années 1865, une réputation nationale. Et ce, grâce à l’invention d’un type de décor laqué appliqué d’abord sur des pièces en céramique puis sur des petits meubles en bois.

La formation du fils se fait à l’École Municipale de dessin à Nancy puis à l’École des Beaux-Arts à Paris. Et à la suite de la disparition précoce de son père en 1879, Louis reprend la direction des ateliers artistiques après avoir appris son métier d’ébéniste auprès des ouvriers de son père.

Quand il s’installe dans sa villa, Louis Majorelle est au faîte de sa renommée. Il vient d’être récompensé par le jury à l’exposition universelle de Paris en 1900 pour la qualité de ses meubles et distingué par une Légion d’Honneur dûment méritée. Les commandes affluent, les affaires vont bien. Sans doute est-il un des décorateurs les plus en vogue en ce début de siècle.

En 1916, les bombardements allemands et les incendies détruisent pour partie villa et ateliers ainsi que les magasins de la rue Saint Georges. Il lui faut reconstruire en plus grand et en plus moderne. En 1924, déjà fatigué, il part se reposer chez son fils à Marrakech. Il décède le 15 janvier 1926, quelques mois après le succès remporté à l’exposition des arts décoratifs et industriels modernes de Paris en 1925.

Jane Kretz (1864-1912)

À 48 ans seulement, le 31 décembre 1912, l’épouse de Louis Majorelle, Jane Kretz, disparaît. Année funeste pour l’industriel d’art puisque, 4 mois auparavant, il avait eu la douleur de perdre sa mère (1835-1912). Cette dernière fut pour beaucoup dans le succès de l’entreprise familiale. En effet, Mme Veuve Auguste Majorelle, femme autoritaire, avec un sens inné du commerce, a su s’entourer de deux de ses fils : Louis pour la direction et la production artistique et Jules pour la partie commerciale. Un triumvirat qui permet de passer de la petite manufacture à l’entreprise rationnelle et organisée de la Société Majorelle Frères.

L’avis de décès rend compte d’une nombreuse famille. Louis Majorelle est issu d’une fratrie de huit frères et sœurs (quatre participeront de près ou de loin à l’affaire familiale). Il épouse, le 7 avril 1885, Jane Kretz, fille du directeur de la Scène au Théâtre de l’Odéon, chez lequel, jeune fille, elle avait croisé la célèbre comédienne Réjane (1856-1920).

Les photographies de son fils figurent le portrait d’une personne aimable, douce, pianiste distinguée, amateur de belles choses et profondément amoureuse de son époux. Très proche de son fils Jacques, enfant unique, elle incarne la joie de vivre dans une nature vivante, prolongement du décor intérieur de sa maison.

Contenu du La famille Majorelle
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Jacques Majorelle (1886-1962)

Il est décidément beaucoup question de peinture dans cette famille, peinture que Louis ne délaissera jamais, y associant tôt son fils Jacques. Tous deux se font photographier au même moment et au même endroit de manière fort traditionnelle, il est vrai. Dès son plus jeune âge, Jacques s’exerce à la pratique picturale, notant les impressions visuelles suggérées par les plantes du jardin familial. Les amis de son père, Victor Prouvé, Émile Friant ou Henri Royer, guident ses premiers pas.

Sa jeunesse se passe donc dans un contexte très privilégié. Plusieurs photos le montrent avec sa grand-mère Majorelle qui, habitant au-dessus des magasins de la rue Saint-Georges, venait passer des journées entières rue du Vieil-Aître, dans une campagne encore privilégiée (l’église du Sacré-Cœur n'est construite qu’en 1905). Probablement rendait-il visite de temps en temps à son autre grand-mère, Léonie Kretz (✝ 1908), installée tout proche au 37 rue de Laxou ainsi qu’à son arrière grand-mère, Mme Veuve Depierre (✝ 1903). Une ambiance toute féminine, certes, qui n’excluait pas pour autant les discussions animées autour de la table de la salle à manger, sous les panneaux peints de Francis Jourdain, un artiste parisien, et les vitraux colorés de Jacques Gruber. Que de couleurs, que de lumière !

Par la suite, les nombreux voyages de Jacques au Moyen Orient et son installation à Marrakech, sa passion pour l’Afrique, en ont fait un peintre orientaliste de renom. Cependant, il n’oublie jamais les variations colorées des décors de la maison de son enfance, ni la lumière qui fut un signe de modernité évident dans le décor intérieur de la villa Jika.